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mardi 11 avril 2017

Peinture - contour - dessin

Toujours à la recherche d'une peinture vivante. 

L'arbre (2015 - tempera 41 x 31 cm)
Pour cela, il faut commencer, nous l'avons vu, par accepter et développer une peinture très sensible aux conditions initiales de son contexte ; on peut alors considérer qu’elle est régie par les principes du chaos (cf #chaos). Mais cela semble insuffisant, surtout lorsque le dessin entre en jeu dans le processus créatif.
Je cite August Strindberg dans « Nuits de somnambule » :《[•••] refuser le dessin-contour qui mettrait la nature sous le contrôle de la raison et emprisonnerait ses incessantes métamorphoses.[•••]》
Va-t-il s'agir de produire des dessins dont les contours sont inexistants ?
《Quite a challenge !》 disent nos collègues d'outre-Manche.
 Il faut bien comprendre ce qui sous-tend cette attitude. Alors que le dessin avec lignes de contours permettait, après analyse, de définir la forme exacte, mais souvent figée d'un sujet, Strindberg propose de reporter des formes pouvant évoluer dans le temps et l'espace, mais aussi dans l'esprit du spectateur. Le modèle sera dès lors perçu au travers de l'évolution possible de ses attitudes. Fini les "Ne bougeons plus !".
Le fait que Strindberg soit peu à l'aise avec le dessin, surtout les personnages, a peut-être influencé son manifeste. Mais qu'importe !

(1930)          P.Bonnard -  L'Amandier             (1947)
Pierre Bonnard, lui, maniait le dessin et le graphisme avec aisance. De plus, il  fut très tôt enthousiasmé par l'art japonais, particulièrement celui des kakemonos. Les surfaces y sont très clairement définies par des aplats de couleurs, des motifs récurrents ou/et des lignes de contour très nettes, très graphiques. Il s'en inspira pendant des années. Il se forgea une "méthode" faite d'une réserve de milliers de petits dessins, son « réservoir de formes», prises d'instincts, sur le vif. Il gardait pour la couleur les réflexions les plus profondes de son art. Néanmoins, il travaillait ses tableaux surface par surface. Proche de la fin de sa vie, il confia à Jean Bazaine : «Je commence seulement à comprendre ; il faudrait tout recommencer !..».

On voudrait évidemment savoir ce que Bonnard avait  compris.

(1889)         P.Bonnard -  Autoportrait          (1945)
Du moins moi, j'aimerais savoir. Plutôt que de prêter des paroles hypothétiques à un disparu, je préfère me pencher sur les témoignages picturaux qu'il nous a laissé. Ensuite, libre à chacun d'essayer de comprendre ce qu'il peut. Pour ma part, je conserve l'angle de vue "Contours / Surfaces".
J'ai choisi pour cette observation deux sujets très récurrents : les autoportraits et les amandiers. L'un des amandiers (à droite) fut sa dernière œuvre ;

P. Bonnard - Nu au tub (1912)
 L'un des autoportraits, celui de droite, fut son dernier. (Excluons l'hypothèse que toute peinture est un autoportrait de celui qui l'a peint)

Ce qui est extraordinaire, c'est que très souvent ses crayonnés donnent l'impression que le contour est en fait multiple, donnant l'impression que le sujet était en pleine évolution.

 La cohérence totale est parfois un long cheminement, parsemé tout de même de bien belles pièces, merci, Monsieur Bonnard.


Et merci à vous, lecteur, pour votre attention.


Et voici la version traduite par Christina

Painting -contour - drawing

Always looking for a living painting. To do this, we have to begin, as we have seen, to accept and develop a painting very sensitive to the initial conditions of its context; We can then consider that it is governed by the principles of chaos (cf #chaos). But this seems insufficient, especially when drawing comes into play in the creative process. [IMAGE 1 L'arbre 2015 tempera 41 x 31 cm ]
I quote August Strindberg in "Nuits de somnambule": "[...] refuse drawing that would put nature under the control of reason and imprison its incessant metamorphoses.
Will it be a question of producing drawings whose contours are non-existent?
"Quite a challenge!" Say our colleagues from across the Channel.
 We must understand what underlies this attitude. While the drawing with contour lines made it possible, after analysis, to define the exact but often frozen form of a subject, Strindberg proposes to transfer forms that can evolve in time and space, but also in the spirit of the spectator. The model will therefore be perceived through the possible evolution of its attitudes. Finished the "Don't move!".
The fact that Strindberg is not at ease with the drawing, especially the characters, may have influenced his manifesto. But whatever !

Pierre Bonnard handled drawing and graphic design with ease. Moreover, he was very early enthusiastic about Japanese art, especially that of the kakemonos. The surfaces are very clearly defined by flat areas of color, recurring patterns and / or contour lines very clear, very graphic. He was inspired by it for years. He forged a "method" made up with a  reserve of thousands of small drawings, his "reservoir of forms", taken instinctively, on the spot. He kept the most profound reflections of his art for color. Nevertheless, he worked his paintings surface by surface. Near the end of his life, he confided to Jean Bazaine: "I am only beginning to understand; One should start all over again! "

One would of course want to know what Bonnard had understood.

At least I would like to know. Rather than lend hypothetical words to a missing person, I prefer to look at the pictorial testimonies that he left us. Then, everyone is left free to try to understand what can be. For my part, I keep the angle of view "Contours / Surfaces".
I have chosen for this observation two very recurrent subjects: self-portraits and almond trees. One of the almond-trees (on the right) was his last work;
[IMAGE 2 -- P.Bonnard  L'Amandier 1930 & 1947]
[IMAGE 3 -- P. Bonnard  Autoportrait 1889 & 1945 ]
One of the self-portraits, the right one, was his last. (Excluding the hypothesis that all painting are a self-portrait of the painter)
What is extraordinary is that very often  Bonnard' pencils gave the impression that the contours are in fact multiple, giving the impression that the subject was in full evolution.
[IMAGE 4 P. Bonnard Nu au tub  1912 ]
 The total coherence is sometimes a long search, scattered all the same by very good pieces, thank you, Mr. Bonnard.
And thank you, reader, for your attention

mercredi 13 avril 2016

Chaos (III) -  Marre de l'économie de moyen !

J'aime en art l'acte, le processus de recherche, le temps de la créativité. J'aime me plonger dans l'élaboration d'une oeuvre pour des jours, des semaines et des mois. J'aime la naissance physique de l'oeuvre et aussi sa venue progressive dans mon monde mental, sensible, spirituel.

Avec l'économie de moyens, je ne peux que faire preuve de mon éventuelle virtuosité. Mais je dois alors me priver de la recherche pure. Et ça : jamais !

Je veux au contraire utiliser une propriété qui a été mise en évidence par les recherches sur le déterminisme : la faculté proprement créatrice du chaos, de la sensibilité extrême aux conditions initiales. Ses effets n'apparaissent clairement et irréfutablement qu'après un grand nombre de mises en oeuvre, d'observations de ces mises en oeuvre et de leurs mises en perspective, voire en abîme.

Ainsi, je peux poser de nombreuses traces de formes triangulaires ou trapézoïdales ;   peu à peu elles se transforment ensemble par le simple fait que je les pose en ayant pour objectif la production d'une image mentale, peut-être le modèle auquel je me réfère.
Et ça marche !

image n°1
étude au fusain (grosse branche)
sur papier 56x42cm
L'image reproduite ici a été construite à l'aide d'un bloc de fusain cylindrique, un morceau irrégulier de branche d'arbre de la dimension d'un doigt. Certaines clartés ont été posées à l'aide d'un bloc de craie ressemblant à une petite brique de section carrée de même dimension que le fusain.

Le résultat est une image, la restitution d'une observation de la vie domestique. On y associera les symboles que l'on voudra, ou pourra.

Bien sûr, la précision qu'aurait permis une étude au crayon de graphite, par exemple, aurait été supérieure. Nous aurions pu obtenir plus de détails.

Mais l'approche par taches est plus picturale. Malgré l'absence de détails ou peut-être grâce au manque de détails,  elle est beaucoup plus évocatrice. En effet, l'esprit de l'observateur est en situation de devoir compléter lui-même la représentation. C'est le récepteur qui est le dernier maillon, avec toute son histoire, de la création de l'image. Cette dernière est donc totalement imprévisible dans son état final, tout en restant un vecteur important de communication.

Finalement, cerise sur le gâteau, au plaisir de la recherche du peintre s'ajoute le plaisir de la découverte de l'observateur. Je ferai donc l'économie de l'économie de moyens !

[Il se peut qu'une redondance apparaisse au fil de ce blog. C'est dans la nature même de ce type de communication. En effet, autant un livre propose la somme concaténée et épurée d'une recherche, autant le blog est le réceptacle, au fil du temps, de l'évolution de la recherche, avec ses avncées, ses hésitations, ses trous et ses répétitions éventuelles. Merci à ceux qui peuvent l'accepter, et mes regrets à ceux qui s'en lasseraient.]

Et maintenant, la version en anglais, par Christina :

And now, the english version by Christina :

Chaos (III) - Tired of the economy of means!

In art, I like the act, the searching process, the creativity time. I like to immerse myself in the development of a work for days, weeks and months. I like the physical birth of the work and also its gradual coming into my mental, sensitive, spiritual world.

With the economy of means, I can only show my potential virtuosity. But then, I have to deprive myself of pure research. And this: never!

I would rather use a property that has been highlighted by research on determinism: the actual creativeness of chaos, from the extreme sensitivity to initial conditions. Its effects appear clearly and irrefutably only after a large number of enforcement, observation of these enforcement and by putting them into perspective or even abyss.

Thus, I can apply many streaks of triangular or trapezoidal shape; gradually they evolve and progress by the simple fact that I apply them with the objective of producing a mental picture, perhaps even the model to which I refer. And it works !

The image reproduced here (see image n°1) was built with a cylindrical charcoal block, an irregular piece of tree branch the size of a finger. Some lights were applyed with a chalk block resembling a small brick square of same dimensions as charcoal.

The result is an image, the restitution of a moment of domestic life. One will associate the symbols that he will, or can.

Of course, the accuracy that would have benn allowed by a study in graphite pencil, for example, would have been higher. With much more details.

But the approach by spots is more pictorial. Despite the lack of details, or perhaps due to the lack of detail, it is much more evocative. Indeed, the mind of the observer is in the position of having to complete the representation by himself. It is the receiver who is the last link, with his entire history, of the creation of the image. The latter is therefore totally unpredictable in its final state, while remaining an important vector of communication.

Finally, icing on the cake, to the pleasure of the  painter' research, comes in addition, the pleasure of the discovery by the observer. So much for the economy of the economy of means!

dimanche 29 novembre 2015

Simple et libre

La seule vraie difficulté en peinture est d’être simplement libre et librement simple.
Miroir  tempera sur papier 32x20cm
Ce n’est pas un jeu de mots.
 Je veux juste dire que parmi le fouillis indescriptible de tous les conditionnements que j’ai acquis au long de mon existence, trouver un chemin de liberté est une vraie difficulté. Ma liberté est difficile à définir.
 D’autre part, faire vœu de simplicité est une bien belle direction à prendre pour cheminer. Mais si, d’aventure, je ressens un besoin de faire de la dentelle, pourquoi devrais-je m’en priver ?
 L’expression artistique demeure pour moi une tentative d’expression, de communication et d’esthétique. Cela implique de pouvoir évoluer dans un contexte libre, peut-être simple, en tous les cas et surtout serein.
 C’est ainsi que pour pouvoir faire le point sur mes outils d’expression, l’autoportrait demeure pour moi le véritable exercice d’authenticité :
  • modèle toujours disponible
  • modèle indifférent à toute considération narcissique
  • peintre libre de prendre son temps et de jouer avec son tableau.

kiss  [Keep It Simple & Short]

​Pour nos amis anglophones, une libre et simple et excellente traduction de Christina.
For our English speaking friends, a free, easy and excellent translation from Christina.
Au commencement ...

English résumé

The only real difficulty in painting is to just be simply free and freely simple.
This is no wordplay.
 I just want to say that among the indescribable jumble of all the conditioning that I have acquired throughout my existence, finding a free path is a real problem. My freedom is difficult to define.
 On the other hand, making vow of simplicity is a beautiful way of wandering. But if, by chance, I feel a need to privilege subtlety, why should I do without it?
 Artistic exteriorisation remains for me an attempt of expression, communication and aesthetics demonstration. This implies to evolve in a free context, perhaps simple, in any cases and above all serene.
 Thus, in order to be able to update my means of expression, self-portrait remains for me the true exercise of authenticity:
  • The model (me) is always available
  • This particular model (me) remains free from any narcissistic consideration
  • The artist (me) is welcome to take his time and play with his own production.
kiss [Keep It Simple & Short]

mardi 24 novembre 2015

Jamais plus jamais

Voici pour clore ma réflexion – évaluation de mes rapports avec le dessin et la peinture.
La laitière [the milkmaid]
graphite sur papier, 28x21cm
Dans cet exemple de la laitière, les nuances entre un dessin très plein (relativement peu graphique) et une peinture tout en rapport de surfaces sont évidentes. Si le sujet semble le même, la différence des traitements picturaux leur donne à chacun un état d’esprit radicalement différent. On peut d’ailleurs préférer l’un ou l’autre selon sa propre humeur ou selon l’usage que l’on désire en faire. On peut aussi les présenter en complément l’un de l’autre – en pendant, le dynamisme et la “rusticité”du dessin offrant son énergie vitale à la douceur presque nostalgique.
Quant à l’artiste, si j’ai eu du plaisir lors des deux réalisations, j’admets mieux me reconnaître dans la version au graphite que dans celle à la tempera. J’ai traité le dessin comme une peinture, utilisant des blocs plutôt que des crayons, mais surtout, j’ai pu y déployer mon énergie avec une plus grande spontanéité. Pourquoi ? Je l’ignore. C’est un simple constat.
Ce qui me paraît de plus en plus avéré, c’est qu’une image m’apparaît de plus en plus pour elle-même, hors de toute considération technique ou stylistique.
Dessin ou peinture ? Qu’importe, il faut que ça sorte, que le plaisir l’emporte !  « kiss »

Pour nos amis anglophones, voici la version de Christina :

English Résumé

Never Say Never
Here is to end my reflection – an evaluation of my relationship between drawing and painting.
La laitière [the milkmaid]
tempera sur Arches, 41x31cm [egg tempera]
In this example of the milkmaid, shades between a plain drawing (with relatively few graphism) and a painting all in surfaces reports are obvious. If the subject seems the same, the difference of the pictorial treatment gives each one of them a radically different mindset. One can however prefer one or the other, according to one’s mood or to the wished use. One can also present each one of them as a complement to the other – vis-à-vis, the dynamism and the "rusticity" of the design offering its vital energy to the almost nostalgic sweetness.
As for the artist, if I had fun at both achievements, I must admit that I recognise myself better in the graphite version than the tempera one. I treated the drawing as a painting, using blocks instead of pencils, but most of all, I was able to deploy my energy with greater spontaneity. What for ? I don’t know. It’s a simple fact.
What seems increasingly proved is that a picture appears to me more and more as herself, outside of any technical or stylistic consideration.
Drawing or painting ? Whatever… just make sure that the fun wins !  "kiss"

samedi 14 novembre 2015

Peindre ou faire la guerre

Prologue – Peindre ou faire la guerre

« miroir 02 »
tempera à l'oeuf sur papier
egg tempera on paper
31x20.5cm
J’allais publier mon article lorsque j’apprends, qu’à nouveau, des états armés se font la guerre par victime civiles interposées. Les marchands d’armes et autres profiteurs de conflits commencent à y croire, leurs beaux jours se dessinent de plus en plus précisément à l’horizon.
Je suis pris d’une insidieuse contagion celle de la violence. La tentation de la violence. C’est ma nature -humaine-.
Heureusement, mon système immunitaire mental réagit à merveille et, peu à peu, je retrouve mon esprit constructif -humain lui aussi- qui me permettra d’agir à ma façon. Ceci même si mon attitude paraît dérisoire en comparaison de ce que vivent les victimes de toute horreur.
(suite de cette réflexion en fin d’article)

Voici donc.

Peindre-dessiner : l'état d’esprit en actes

    peindre – dessiner
    montrer – dire
    teindre – délimiter
    tacher – ligner
    poser un accord – tracer une mélodie
Les attitudes suivantes sont nécessaires aux deux spécialités :
Contempler – analyser – reproduire sa « petite » (Cézanne) sensation.
Peindre serait une attitude plutôt démonstrative, alors que dessiner serait une attitude plus discursive, plus intellectuelle. Tout ceci me semble très réducteur.
Chercher à peindre–dessiner revient pour moi à vouloir utiliser l’ensemble des potentiels du cerveau au service d’une expression artistique visuelle graphique. Simplement.
projet -esquisse
L’outil n’est pas le pinceau ni le crayon, mais bien l’intention, la lumière, la couleur et l’acte de les poser sur la surface picturale. C’est donc bel et bien la touche, les intentions qui la motivent et l’énergie qui l’anime qui font l’œuvre d’art. La touche qui se fait incisive ou caressante, précise et fine, ou large voix fondue, discursive ou passive, allusive ou rêveuse…
(En ce sens, l’art japonais du sumi-e est une forme de dessin–peinture)
On a souvent dit que le dessin permet d’entrer dans l’intimité du peintre. Admettons, mais alors que dire de la peinture de Bonnard, qui d’ailleurs reposait fermement sur ses nombreux dessins préparatoires. Que dire aussi des bozzetti et modelli de Rubens (ses diverses esquisses à l’huile) ?
De plus, l’artiste ne suffit pas à la production artistique. Je veux dire qu’il n’y a pas que le « faiseur » (poète, en grec). De l’autre côté de l’œuvre se trouve le récepteur. Spectateur (quelquefois propriétaire) outillé de sa sensibilité, de son regard, de son état d’esprit forgé par tout ce qui a fait qu’il est présent devant une image qui va réellement influencer son existence, positivement ou non. Sa vision lui appartient en propre. Sa part artistique est aussi importante que celle du poète visuel.
ébauche couleur
D’aucun diraient que ce sont les critiques, les mécènes et le marché qui font l’art, mais ce n’est vrai que depuis Masaccio et la Renaissance. Ils ne font d’ailleurs pas l’art, mais la renommée et l’oubli des “artistes”… qui se portaient probablement mieux lorsqu’ils étaient artisans, itinérants ou établis.

Epilogue – Rendre son esprit disponible à la beauté plutôt qu’à l’horreur.

Notre culture de masse – cinéma, télévision, etc. – nous abreuve de situations où une logique concurrentielle, agressive, violente est la norme. Les personnages se débattent dans un monde et une société d’humains au mieux indifférents, au pire hostiles.
De ce fait, le cerveau des spectateurs devient de plus en plus capable d’accueillir une telle réalité et, sans même la provoquer, peut la considérer le cas échéant comme « normale ». En effet, il se passe au niveau du fonctionnement cérébral la même chose qu’avec les phénomènes publicitaires. Nous n’avons pas besoin d’un produit, encore moins d’une marque. Mais le jour où la question se posera, on se dirigera automatiquement vers les produits et les marques déjà vues ou entendues, car elle sont tout bonnement familières à nos circuits neuronaux et leur évitent ainsi une analyse coûteuse en énergie.

fin ébauche couleur
Je suis un humain, faiseur d’images. Mon cerveau d’humain a besoin d’explications, de causes, d’effets. Comprendre. Je n’ai aucune théorie pour permettre à mon cerveau… perfectible, de comprendre vraiment tout cela. Je crois qu’un principe vital universel est à l’œuvre, au sens large. Mon expérience me montre que je ne vais bien qu’en état d’harmonie, qui elle-même se nourrit de ce que l’on nomme au sens large l’amour, la bonté ou parfois, la beauté. Voilà pourquoi je veux continuer à tout prix à proposer des images dont le contenu – au minimum esthétique – prédispose à les accueillir : la voie de la beauté.

Ce faisant, je ne suis pas un grand innovateur. Lors des deux dernières guerres mondiales (je veux dire la 1 et la 2) Bonnard n’agissait pas autrement, par exemple. Avant cela, Rubens a choisi de magnifier l’humain en général, ses épouses successives et ses enfants en particulier, ce qui lui permettait de croire mieux que de survivre, dans un siècle où les horreurs et la peste n’épargnaient ni sa contrée, ni sa famille. Il œuvrait aussi en tant que diplomate – son statut le lui imposait – mais il ne s’engageait qu’en faveur de la paix. Les exemples de peintres résolument positifs, parfois activistes, ont été nombreux dans l’histoire de l’art. C’est tant mieux.
corps de peinture

J’en ai assez dit. Je ne sais pas ce qu’il en est pour vous, mais pour ma part, je suis convaincu.
Allez… Salut les artistes !

Et bonjour les artistes anglophones. Traduction par Christina :

English Résumé


Prologue – To paint or make war

I was going to publish my article when I heard that, again, armed states make war by interposed civilian victims. Arm dealers and other war profiteers act as if they believe that their heydays emerge more and more precisely on the horizon.
I briefly suffered from an insidious contagion… that of violence. The temptation of violence. This is my nature – human –.
Fortunately, my immune system reacted well and, step by step, I found again my – human too – constructive mind that will allow me to act my way. This, even if my attitude seems pales in comparison to the experiences of victims of any horror. (This discussion will continue at the end of this article).

So here's.
reprise des clartés

Paint – draw: the state of mind in action

    paint – draw
    show – say
    dye – delineate
    stain – Line
    ask an agreement – draw a melody
The following attitudes are necessary to both specialties :
Contemplate - analyze - reproduce the "small" (Cézanne) sensation.
To paint is an attitude rather demonstrative, while to draw is an attitude more discursive, more intellectual. All this seems very reducer.
Seeking to paint or draw means to me using all the potential of the brain in the service of a graphic visual artistic expression. Simply.
The tool is not the paintbrush or the pencil, but the motive, the light, the color and the act of placing them on the pictorial surface. It is indeed the touch, the underlying intentions and the driven energy which form the work of art. The touch that is caressing or incisive, precise and fine, or ample melted voice, discursive or passive, allusive or dreamy…
seconde reprise couleur
(In this sense, the Japanese art of sumi-e is a form of drawing and painting)
It was often said that the drawing allows you to enter into the intimacy of the painter. I recognize that, but then what about the paintings by Bonnard, who are also firmly based on his numerous preparatory drawings. And then, what is to say about the bozzetti and modelli of Rubens (his various oil sketches)?
Most of all, the artist does not suffice to the artistic production. I mean there is not only the "doer" (poet, in Greek). On the other side of the artpiece is the receiver. Onlooker (sometimes owner) equipped with his sensitivity, his vision, his state of spirit wrought by everything that has brought him before an image that will really influence his existence, positively or not. His vision belongs to him. His artistic hand is as important as that of the visual poet.
Some would say that it is the critics, sponsor and the art market that « make » art, but this is true only since Masaccio and the Renaissance. In fact, they dont « do » the art but only the fame or the oblivion of “artists”… which were probably better of when they were only artisans, itinerant or established.
travail achevé
«
 miroir 02 »
tempera à l'oeuf sur papier
egg tempera on paper
31x20.5cm

Epilogue – To make one’s mind available to beauty rather than horror.

Our mass culture – movies, TV, etc. – inundates us with situations where a logic of competition, aggressiveness and violence is the norm. The characters struggle into a world and a human society at best indifferent, at worst hostile.
Therefore, the brain of the spectator becomes more and more able to accept such norms and, even without inducing them, may consider them as "normal". Indeed, it happens at the level of brain function the same things as with the advertising phenomenon. We do not need a product, m
uch less a brand. But when the question will arise, it will automatically direct us towards the products and brands already seen or heard of, as they are simply familiar to our neuronal circuits and prevent them from an expensive loss of analysis energy.

vérification des valeurs
verification of values
I am a human, images maker. My human brain needs explanations, causes, effects. Understanding. I have no theory to allow my brain… perfectible, to really understand it all. I believe that a universal vital principle is at work, at large. My experience shows me that I feel well only in a state of harmony, which feeds itself with what is called, in the broad sense, love, kindness or sometimes beauty. That's why I want to continue, at any cost, to provide images whose content – at least aesthetically – predisposes to welcome : the way of beauty.

In doing so, I am not a great innovator. During the two world wars (I mean the 1 and 2) Bonnard did not act otherwise, for example. Before that, Rubens has chosen to magnify the human in general, his wives and children in particular, which allowed him to think better than to survive in an age when the horrors and plague spared neither his country nor his family. He also was working as a diplomat – his status obliged him to – but he only pledged in favor of peace.
Examples of painters resolutely positive, sometimes activists, have been multiple in the history of art. So much the better.

I've said enough. I don’t know how it is for you, but as far as I am concerned, I am convinced.
Come on… hello artists !

lundi 9 novembre 2015

La fille d'à côté productions



Comme annoncé la semaine dernière, voici dès aujourd'hui sur les fils du web les deux livres écrits par Christina et illustrés par moi-même.

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Vous en reprendrez bien un peu est un recueil de textes courts illustrés. Christina revient sans concession, mais avec tout le sel de son humour sur des événements parfois improbables de sa riche existence ; elle m'a invité à compléter ses histoires de quelques illustrations. Pour cette série, les images adoptent le ton du sourire poétique.




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Comme si le soleil brillait partout se présente sous forme de textes "nouvellisants". Vous la retrouvez, enceinte, avec d'un bébé de 18 mois et d'un mari qui voit ses capacités de travail se réduire brutalement. Cerise sur le gâteau, tout ce petit monde évolue dans un vieux chalet des Alpes suisses.

Christina raconte au plus près de sa sensibilité et avec humour les découvertes qu'elle y a faites sur les richesses et les limites de son environnement et d'elle-même. Cette fois encore elle m'a gentiment offert la partition visuelle de son ouvrage, ajoutant du même coup une seconde voix à son chant intime.


Vous trouverez une autre présentation de Christina et des 2 ouvrages sur cette page. Le téléchargement libre et gratuit y est également possible.
Pour conclure, tout en rebondissant sur l'article précédent, je ne peux que vous inviter à jouer le jeu et à télécharger ces 2 ouvrages pour comparer l'expérience de leur lecture avec l'expérience de la seule vision des illustrations, pour elle-même. Vous pourrez alors constater, d'une part comment votre propre imaginaire complète les images, mais aussi comment le texte et son image forme un couple authentique, plus évocateur que l'image ou le texte seul.
Bien que les ouvrages soient en français, voici une traduction de l'article pour nos amis anglophones. Aujourd'hui encore, c'est Christina qui peaufine la version anglaise. Merci à elle.

English Résumé

Although the books are in French,  here is a translation of the article for our English speaking friends. Today, it’s Christina again who refines the English version. Thank’s to her.

The girl next door productions

As announced last week,you will find today on the web the two books written
by Christina web and illustrated by myself.

Won’t you have some more ? is a collection of illustrated short stories. Christina returns without compromise, but with all the salt of his humor, uncertain, sometimes improbables events offer rich existence ; she invited me to complete her texts with a few illustrations. For this serie, the images adopt the tone of a poetic smile.

As if the sun was shining everywhere appears under the form of texts « newellisants ». Finding herself pregnant, with an 18 months old baby and a new husband who sees his working habilities cruelly reduced. Top on the cake... this little world is evolving in a very old chalet lost in the Swiss Alps.
Christina relates, to the nearest of her sensitivity and humor, the discoveries that she made concerning the wealth and most of all the limits of her environment and especially herself.
Again she kindly offered me the visual partition of her work, adding at the same time a second voice to her inner song.

You will find another presentation of Christina’s 2 books on this page. The free download is also available.

To conclude, while bouncing on the previous article, I can only invite you to play the game by downloading these 2 items and compare the experience of reading them with the experience of the sole vision of the illustrations for themselves. You will then see, at first how your own imagination completes the images, but also how the text and its images forms a genuine couple more evocative than the image or text alone.
Here are again the links towards the 2 albums of illustrations only :


see 17 illustrations
see 34 illustrations















And as always, thanks for reading and watching.

samedi 7 novembre 2015

illustration ou peinture ?

Un débat parfois très intolérant oppose les peintres et les critiques : la peinture peut-elle "dire" quelque chose ?
Eugene de Blaas: The friendly gossip
(source wikimedia)
Pour beaucoup, le seul sujet admissible en peinture est la peinture elle-même.
Si un peintre "raconte", on dit avec mépris que sa toile bavarde.
C'est surtout vrai depuis l'époque de l'art moderne.

Bref, si je me suis absenté de ce blog ces dernières semaines, c'est d'une part pour essayer d'affiner une méthode picturale d'expression (cliquez pour entrevoir mon chevalet), mais aussi parce que j'ai eu le plaisir d'illustrer un livre écrit par Christina (oui, celle-là même qui traduit ces articles pour les lecteurs anglophones).
Le sujet d'aujourd'hui est donc bien fondé.
Socrate, ses deux épouses et Alcibiadepar Reyer Jacobsz van Blommendael, peinture sur toile, 210 x 198 cm, xviie siècle, musée des beaux-arts de Strasbourg.
(source wikipedia)
L'illustration est une création picturale aussitôt qu'elle cherche à offrir une seconde partition à l'oeuvre écrite. L'artiste, en effet, pourrait se borner à "dire en image" ce qui est écrit en mots. On pourrait alors qualifier les images de bavardages. Mais si le peintre-illustrateur offre une vision personnelle et cohérente de sa lecture du texte (dans un esprit poétique, ou satirique, ou polémique, etc.) alors les illustrations ne parlent plus. Elles parfument le texte.
Dans ce cas, l'illustrateur, peintre, dessinateur ou graveur opère légitimement dans le domaine de l'art.

Vous trouverez prochainement dans ce blog des liens vous permettant de télécharger gratuitement les deux ouvrages écrits par Christina, illustrés par mes soins. Je vous les présenterai plus en détail le moment venu.


Pour vous permettre de patienter, permettez-moi de vous offrir dès maintenant une petite promenade temporelle, que vous pouvez consulter - télécharger par ce lien .
Ce document  pdf - 1 couverture couleur et 6 pages noir/blanc - est bien sûr libre de droits.
Cooooopy right  ---   Cooooopie bien
Voici la traduction de ce qui précède pour nos amis anglophones.
And now for our English friends :

English Résumé
A sometimes very intolerant debate opposes painters and critics: may the painting "say" something?
First image >> Eugene de Blaas : The friendly gossip (source wikimedia)

For many, the only eligible subject in painting is the painting itself.
If a painter « relates », it is said despisingly that his canvas is jabber.
This is especially true from the emergence of modern art.


In short, if I was absent from this blog those recent weeks, it was at first because I tried to refine a pictorial expression method (click to glimpse my easel), but also because I have had the pleasure to illustrate a book edited by Christina (yes, the very one who translates these items for my English readers). Today's topic is therefore well founded.
Second image >> Socrates, his two wives and Alcibiade by Reyer Jacobsz van Blommendael, painting on canvas, 210 x 198 cm, seventeenth century, Museum of Fine Arts of Strasbourg. (source wikipedia)


The illustration is a pictorial creation as soon as it seeks to provide a second partition to the written work. The artist, in fact, could simply « tell in images » what is written in words. One could then qualify those images as chatter. But, if the painter-illustrator offers a personal and coherent vision of his reading of the text (in a poetic mind, or satirical or polemical, etc.), then the illustrations no longer speak. They « perfume » the text. In this case, illustrator, painter, draftsman and engraver legitimately operate in the field of art.


You will soon find in this blog some links allowing you to download two books written by Christina, illustrated by me. I shall introduce them with more detail in due course.
In the meantime, let me offer you, hereafter, an humble temporal perambulation. You may watch-download it  using this link or this thumbnail.
This document - 1 color cover followed by 6 black/white pages – is, of course, free of rights.
Cooooopy right  ---   Cooooopie bien

dimanche 6 septembre 2015

Chaos (I)

Je suis intéressé par le chaos, dans le sens scientifique et artistique du terme. Le chaos social m'inspire peu, alors qu'autrement, il est pour moi l'une des conditions indispensable à la vie, à l'évolution.
Lors d'un article précédent(lien), je m'étais appliqué à essayer de représenter une texture chaotique.
Fort de cette expérience, j'avais utilisé les bénéfices de cet apprentissage pour la représentation de la chevelure dans le portrait intitulé Nefertitine. On peut relire tous les articles concernant le  "chaos".
Je désire aujourd'hui prendre note d'un nouveau volet de cette recherche.
L'année passée, nous avons séjourné quelques jours dans une ville Suisse, afin d'observer la cohabitation des arbres et des humains, ces derniers étant représentés par les immeubles d'habitation. J'ai pris environ 300 photographies pour soutenir ma mémoire.
Comme toujours, j’ai fait quelques études au crayon pour élaborer la structure de l'image à naître.



















J'ai également posé l'étude préalable de l'harmonie colorée. Dans ce cas, j'ai choisi de répartir les tons froids au premier plan, laissant les lumières chaudes pour l'arrière-plan. Loin de la provocation gratuite, je profite, au contraire, de mettre en valeur la belle fraîcheur offerte par les végétaux dans un milieu urbain surchauffé par la canicule.
Etude couleur

Voici un état intermédiare du tableau final :
Etape intermédiaire

On peut voir le travail achevé à la tempera sur papier (30x40cm) :
Invitation, 6 septembre 2015

Je proposerai dans le prochain article un travail où le chaos sera présenté pour lui-même, sans élément contrastant (ici le fond jaune structuré de verticales et horizontales) pour le mettre en valeur.

English traduction, by Christina :

Chaos

I am interested in chaos, in the scientific and artistic ways.
Social chaos does not inspire me,whereas otherwise (scientific and artistic) are for me the essential conditions of life and evolution.
In a previous article (link), I applied myself to represent a chaotic texture.
Taking advantage of this experience, I used its benefits for the representation of the hair in the portrait titled Nefertitine. We can read all the articles about the "chaos".
Today I wish to add a new component to this research.
Last year, we stayed a few days in a Swiss city to observe the coexistence of trees and humans, the latest represented by residential buildings. I took about 300 pictures to assist my memory.
As always, I did some studies in pencil to draw the structure of the image yet unborn.
Please, see the graphite sketches, the two first images.
I also laid the preliminary study of the color harmony. In this case, I chose to spread the cool tones in the foreground, leaving the hot lights in the background. Far from being free provocation, I took advantage, on the contrary, to express the wonderful freshness offered by theses plants in an urban environment warmed up by a heat wave.
Please, see : Etude couleur
Here is an intermediate state of the painting :
Please, see : Etat intermédiaire
We can see the work completed with egg-tempera on paper :
Please, see :  Invitation, September 6, 2015
I will present in the next article a work where chaos will be presented for himself, without contrasting element (here the yellow background structured with vertical and horizontal lines) for the showcase.

vendredi 17 juillet 2015

Peinture et art déviants

Nous avons eu l'occasion d'aborder quelques questions sur les portraits dans ces pages. Il y a eu le portrait de mon épouse et un auto-portrait. Le dernier article exposait le portrait d’une expérience très spéciale que j’ai vécue.
J'ai senti la nécessité de m'entourer de deux nouveaux portraits, ayant chacun pour modèle la photographie en noir et blanc de peintres dont l’œuvre et la démarche artistique ont eu un grand impact dans mon propre parcours artistique. Plus qu'une influence visuelle, picturale, c'est bien plutôt d’une parenté d'état d'esprit qu'il s'agit.

Pierre Bonnard 

Bonnard (1867-1947)
Outre une évolution exemplaire et une œuvre remarquable, sa manière d'élaborer ses images témoignent d'une grande honnêteté, authenticité, pouvant aller jusqu’à l'inquiétude, tant les travaux préparatoires et le soin donné à l'observation de chaque détail prennent de l'importance et de la place dans son emploi du temps.
De plus, Bonnard était un chercheur. En groupe d'abord, parmi les Nabis. Il fit ce constat à Ingrid Rydbeck lors d'une rencontre chez lui à Deauville, en 1937 : « Voyez-vous, quand mes amis et moi voulûmes poursuivre les recherches des impressionnistes et tenter de les développer, nous cherchâmes à les dépasser dans leurs impressions naturalistes de la couleur. L'art n'est pas la nature. Nous fûmes plus sévères pour la composition. La couleur était un moyen d'expression duquel nous devions tirer davantage. Mais l'évolution fut plus rapide que nous. La société accueillit le cubisme et le surréalisme avant que nous ayons atteint ce que nous avions considéré comme notre but… Nous nous trouvâmes comme suspendus dans l'espace en quelque sorte…»
Aussi, poursuivit-il seul, presque en ermite, sa quête de vérité. Il se tenait pourtant informé de l'évolution de ses amis et de l'art dans la capitale.

Roger Chomeaux, dit "Chomo"

Chomo (1907-1999)
Élève surdoué et primé plusieurs fois au cours de sa formation de sculpteur à l’École Nationale des Beaux-arts de Paris, il en vint à rejeter l'ensemble du monde artistique de son époque. Il vécut très mal un différend qui dégénéra en scandale lors d'une exposition qui remportait pourtant un immense succès en 1960. Retranché en forêt avec femme et enfants, il fonda et construisit de ses mains le Village d'Art Préludien. Il y bâtit de nombreuses constructions, tout en sculptant, peignant, écrivant, composant et produisant même une douzaine d'heures de film.
Voici quelques une de ses sentences sur l'art :
La vitesse est une insulte au créateur 
Le temps n’existe pas dans la pensée 
Dépassée la frontière de la souffrance, c’est la béatitude 
Avoir osé aller jusqu’aux extrémités de l’âme.
L’artiste pur est un médium disponible à toutes les sensibilités 
L’art n’est pas fait pour être vendu 
Je suis riche de pauvreté, ils sont pauvres de richesse 
Quelle empreinte auras-tu laissée sur la terre pour que ton Dieu soit content ? 
etc.
Pierre Bonnard et Chomo sont pour moi des compagnons de réflexion grâce à leurs communications qui témoignent d'un lent travail de maturation et de développement artistique.
Et si l'on vendait les oeuvres de Bonnard à des prix qu'il trouvait trop élevés, il qualifiait cela de "pas convenable", et offrait directement sa peinture pour des sommes dérisoires, au grand dam de ses marchands d'art habituels.

Bonnard et Chomo : deux caractères opposés, mais un sens commun du souci d'authenticité artistique et d’une certaine pratique de l'ascèse.

J'aurais pu joindre JMW Turner à cette liste, lui qui s'y connaissait également en recherche artistique et en ascèse (il n'utilisa son immense fortune que dans le but d'une diffusion ultérieure gratuite de son art). Il était, lui aussi, un praticien de l'authenticité, jusque dans l'expression du sentiment d'une certaine sublimité. Je n'ai malheureusement fait de lui qu'un portrait ayant pour modèle son masque mortuaire, seule représentation fiable de son visage de peintre adulte. Cependant, je refuse une représentation cadavérique comme symbole d'un interlocuteur. D'ailleurs, la représentation spirituelle, mentale que je me suis fabriquée de lui au travers de sa peinture, de ses écrits et des nombreuses monographies que j'ai lues à son propos, suffit largement à mon bonheur. Je recommande par ailleurs le site de la Tate Gallery qui propose les reproductions numérisées de l'ensemble des oeuvres qu'elle abrite sous son toit.

Voilà pour cet article.
J'espère reprendre rapidement la suite de ma propre quête picturale. J'en rendrai compte bien sûr en ces pages, sans omettre de citer les quelques peintres que mon chemin m'amène parfois à rencontrer.
CopieBien - CopyRight

English résumé by Christina 

Painting and deviant art 

We take the opportunity to address few questions about the portraits on these pages. There were a portrait of my wife and a self-portrait (link to article). The last article outlined a portrait of my way of living a very special experience.
I felt the need to surround myself with two other portraits, each of them deriving from black and white photographs of painters, whose work and artistic approach had a great impact in my own artistic development. More than a visual, pictorial impact, it is rather a kindred spirit.

Pierre Bonnard 

Besides exemplary evolution and remarkable work, his way of elaborating pictures shows a great honnesty, authenticity up to worry, as the preparatory work and the care given to the observation of every detail take great importance and place in his schedule.
In addition, Bonnard was a researcher. In team first, among the Nabis, he made this observation to Ingrid Rydbeck during a meeting at his house in Deauville in 1937:
"You see, when my friends and I wanted to pursue our impressionist researches and tried to develop them, we strived to exceed their naturalistic color printing. Art is not nature. We were more severe for composition. Color was a mean of expression of which we wanted to obtain more. But the evolution was faster than us. Society welcomed cubism and surrealism before we reached what we considered to be our goal…  In a certain way, we found ourselves as if suspended in space... "
So he pursued alone, almost as an hermit, his quest for the truth. Yet, he stood informed of the evolution of his friends and of the art, in general, in Paris.

Roger Chomeaux alias "Chomo"

Gifted student and laureate of several awards during his training as a sculptor, at the National School of Fine Arts in Paris, he came to reject the entire art world of his time. Although an exhibition of his work encountered a huge success in 1960, a severe argument degenerating into a scandal caused his entrenchment in a forest he had inherited with his wife and children. There he founded and built with his own hands the Village Art Préludien. He raised many buildings, while sculpting, painting, writing, composing music and even producing a dozen hours of films.
Here are some of his sentences about art:

Speed ​​is an insult to the creator 
Time does not exist in the mind 
Once exceeded the border of suffering remains blessedness 
Daring to go to the extremities of one’s soul. The real artist is a medium available to all sensibilities 
Art is not made to be sold 
I am rich in poverty, they are poor in wealth 
What imprint will you leave on earth for thy God be pleased ? 
etc… 

Pierre Bonnard and Chomo are for me reflections companions through their communications who show a slow process of maturation and artistic development.
And if they sold Bonnard’ works at prices he considered too high, he would describe it as "not suitable" and directly sell his paintings for derisory sums, to the great displeasure of his usual merchants.

Bonnard and Chomo: two opposite characters, but a shared sense of concern for artistic authenticity and asceticism practice. I could join JMW Turner, who also knew his share about artistic research and asceticism,  to this team (he used his vast fortune to free its subsequent diffusion of art). He also was a practitioner of authenticity in the expression of a certain sublimity.
I made, years ago, a portrait of him, whose model was, unfortunately, his death mask, the only reliable representation of his adult face. Somehow, I refuse cadaver representation as a the symbol of an interlocutor. Moreover, all the spiritual, mental representations of him that I collected through his paintings, writings and the numerous monographs that I have read, widely suffice to my happiness.
I also  recommend the Tate Gallery site which offers digitized reproductions of all the works it houses under its roof.

So much for this article.
I hope to quickly resume with my own pictorial quest. Which I will relate of course in this pages, without failing to mention the few painters that my path leads me to meet sometimes.
CopieBien - CopyRight

vendredi 26 juin 2015

Autoportrait intérieur - l'autobiographie dans l'art

Un exercice pratiqué souvent par les peintres est l'autoportrait. Facile à plus d'un titre - le modèle est toujours disponible pendant la durée de la session et n'éprouve aucune susceptibilité au vu du résultat - il permet, en plus d'une introspection personnelle, de faire le bilan pratique de son art, voire d'en explorer des facettes inconnues.  Nous avons déjà parlé de tout ceci lors d'un article précédent.

Ce dont je veux parler aujourd'hui est une forme toute particulière d'autoportrait : les images qui parlent expressément d'un événement particulier de la vie du peintre. Ainsi Monet a-t-il réagi au décès de son épouse en la peignant telle que sur son lit mortuaire. On connaît Munch pour ses évocations très expressives des angoisses et désirs liés à une relation impossible avec une personne convoitée. Plus joyeusement, les maternités de Renoir montrant son épouse Aline et ses enfants au fur et à mesure de leurs croissances. Bonnard était le spécialiste de la peinture intimiste ; même ses paysages faisaient montre d'une vision très intériorisée. 
Je ne donnerai pas l'exemple de Van Gogh, car même si ses premiers travaux dans le Borinage (par exemple : Les mangeurs de pommes-de-terre) étaient très ancrés dans sa vie présente, les analyses de ses futurs travaux tenaient plus de la psychanalyse - grande spécialité des critiques d'art, comme chacun sait - que d'une véritable approche picturale de son oeuvre.


Or, ce n'est pas de psychanalyse que je veux rendre compte aujourd'hui. J'ai concentré mon énergie de la semaine à l'évocation d'une très récente mésaventure que j'ai vécue il y a dix jours. Pour des raisons qu'il est inutile d'évoquer maintenant, je me suis retrouvé en privation d'un médicament très puissant contre la douleur (opiacée). Une véritable crise de manque telle que la vivent bien trop souvent les personnes en proie à diverses toxicomanies. Il est impossible de décrire précisément les souffrances inhérentes à cet état. La douleur et la détresse sont présentes dans chaque cellule du corps.  On appelle la mort à la rescousse. L'oubli. Le néant.


Après quelques jours, tout en les étayant par une documentation glanée sur le web, je me suis mis à la recherche d'images mentales qui pourraient m'aider à extérioriser ce ressenti dont je voulais me débarrasser, tout en le transcendant. Car je dois affirmer ici que cette expérience m'a amené ensuite à revoir la vie et le monde avec les yeux d'un rescapé, d'un survivant en état de totale gratitude, de grand émerveillement.
Fort de tous ces éléments, je me suis mis à voir des bébés, foetus mort-nés, pour des raisons qu'il ne m'appartient pas de juger. Que peut ressentir un être en devenir que l'on vient chercher à renfort de scalpel et de tuyau aspirant ?
De quel manque est-il la victime  ?  Il n'a eu ni le choix de vivre, ni celui de mourir.
Inéluctable. Inévitable. Cruel. Ces trois mots me revenaient en mémoire, liés à mon expérience de la souffrance.


Je vais m'arrêter là, afin de laisser les images porter ce que je tenais à partager, à communiquer. Pour cette fois, je livre des travaux de premier jet, dont l'esthétique n'est pas travaillée, et donc non repris à la peinture, préférant l'expression brute (peut-être même brutale), dessinée comme peinte avec des blocs de graphite, de fusain de vigne et de fusain ocré.


Les quatre visages sont de format A4 ou inférieur. La descente a pour dimensions 80x60cm.
Avant l'exposition de ce travail, je voudrais encore témoigner du soutien et de l'amour que mon épouse Christina a manifesté à mon égard, tant pendant la crise elle-même, que lorsque j'ai choisi de la mettre en image de la manière la plus authentique qui soit. Lui rendrai-je assez hommage au travers de mes peintures...
[Please, see the english traduction of this topic after the pictures ]




Descente


English traduction by Christina

Inside Self Portrait - autobiography in art

An exercise often practiced by painters is the self-portrait. Easy for several reasons - the model is always available for the lenght of the session and feels no susceptibility given the outcome - it allows, in addition with a personal introspection, to focus on the practical results of one's art, or to explore unknown facets. We have already discussed all this in a previous article.


What I want to talk about today, is a very special form of self-portrait: the images that speak specifically of a particular event in the life of the painter. Thus, Monet reacts to the death of his wife by painting her on her deathbed. Munch is known for his expressive anxieties evocations as well as for his desires related to an impossible relationship with a coveted love. More happily, Renoir's maternity show his wife Aline and their children as they grow. Bonnard was the specialist of intimate painting; even his landscapes showed a very internalized vision.


I shall not give the example of Van Gogh because, although his early work in the Borinage (see The Potatoes Eater) was  very rooted in his present life, analysis of his future work related more to psychoanalysis - great specialty of art critics, as everyone knows - than to true pictorial approach.
Yet it is not psychoanalysis that I want to develop today. I focused my week's energy on the evocation of a very recent misadventure that I experienced ten days ago. For reasons which need not be mentioned now, I found myself deprived of a very potent pain reliever drug (opioid). A real withdrawal symptom as too often suffered by people subject to various addictions.


It is impossible to accurately describe the calavary endured in this state. Pain and distress are present in every cell of the body. One is calling death to the rescue. Forgetfulness. Nothingness. After a few days, self supporting them with images found on the web, I started to search representations that could help me to externalize this feeling I wanted to get rid of as well as trensend. However, I must state here that this experience brought me to open my eyes to the life and the world with the look of a survivor. A survivor in a state of total gratitude and wonderment.


Considering all above elements, I began to see babies, stillborn foetus, for reasons that are not mine to judge. What can a potential being resent when beeing tortured by a scalpel, sucked through a hose ? Of wich lack is he the victim? He has neither the choice to live, nor die.
Ineluctable. Inevitable. Cruel. Those three words wandered through my memory, related to my experience of suffering.


I'll stop there, to let the picture communicate what I want to share. For this time I shall deliver a first draft work. Whose aesthetic is not worked and therefore does not include painting, I did prefer the raw (rough ?) expression, (possibly brutale), designed as if painted with graphite block, charcoal vine and ocher charcoal.


The four faces are of A4 dimensions or smaller. The descent of 80x60cm dimensions.


Before the exposure of this work, I wish to testify about the support and love that my wife Christina has expressed to me, as well during the crisis itself than when I chose it to be imaged in the most authentic way ever. I shall give her tribute through my paintings ...