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mardi 25 octobre 2016

Peindre avec le temps

Georges Braque expliquait que le temps était un composant actif dans l'élaboration d'une toile. Il en voulait pour preuve ce récit : après avoir travaillé longtemps sur une peinture sans parvenir à la satisfaction, Braque, quelque peu frustré, avait pris sa toile pour la déposer par terre face au mur.
Quelques jours ou semaines plus tard, il la reprit pour l'examiner. Il découvrit -à sa grande surprise- que le tableau était désormais achevé. Il n'y avait évidemment aucun Lutin ou bon génie au service occulte de Braque. Non. Le seul génie à l'œuvre était sa capacité créatrice. Par simple évolution de sa pensée, Braque put considérer le tableau comme achevé, tel quel.
L'explication du phénomène est bien simple. Tous les Salons du temps des Impressionnistes et au-delà l'ont vu à l'œuvre. Dans un premier temps, l'esprit rechigne à considérer l'inconnu, l'étrange, l'étranger comme familier. Son instinct de préservation mettra en œuvre un processus de rejet, en provoquant un scandale par exemple.
Mais, petit à petit, si l'objet n'a pas été détruit ou si d'autres, semblables, ont réussi à émerger, c'est l'effet inverse qui se produit, soit par apprivoisement, soit par assimilation. Là aussi, le temps fut le maître d'œuvre de la réussite.

Cette longue introduction est là pour m'aider à raconter ce qui m'est arrivé lors de la réalisation de l'invitation n° 11. La composition entière tend à amener le regard vers le visage. Ce dernier doit donc être suffisamment intéressant pour mériter l'effort d'attention du spectateur. Mais comment faire ? Le regard est baissé, le visage est au tiers caché. Reste la chevelure.
Comment la rendre intéressante et expressive sur une si petite surface ?
On voit sur les premières reproductions que j'amoncelle des couches de peinture, cherchant le mouvement, le volume, la luminosité et ceci jusqu'au point où la surface est manifestement surchargée. Il me reste alors l'alternative de blanchir la surface avec une couche supplémentaire ou alors d'essayer de laver progressivement les couleurs en faisant une peinture par retrait. J'ai mis en œuvre cette dernière option pour obtenir ceci [tableau]
L'effet tel quel serait acceptable si un trait presque continu n'entourait la surface, transformant ma peinture en dessin. Il allait falloir chercher encore.
Quelques jours après j'étalai grossièrement à la spatule des jus très dilués de mes trois couleurs primaires, avec des traces de blanc ici et là. Dans un premier temps, le résultat me parut inacceptable. J'étais très déçu. Peu après, il me sembla que j'avais peint une sous-couche très intéressante à développer. J'étais heureux de cette perspective. Au moment où j'écris ces lignes, j'en suis venu à penser que cette chevelure était finalement telle que je la désirais sans le savoir vraiment !
Peut-être n'approuverez-vous pas mon choix.  Revenez le voir dans quelque temps, vous et lui serez peut-être apprivoisés.
Pour voir Le tableau entier (invitation n°11 tempera sur Arches 76x56cm)

And now, the english version by Christina


Georges Braque explained that "time" was an active component in the development of a canvas. He proved his allegation this way : after working a long time on a
première version ...en attente
painting without achieving satisfaction, Braque somewhat frustrated, placed his canvas on the floor facing the wall. A few days or weeks later, he went to examine it. He discovered -to his great surprise- that the painting was now completed. There was obviously no goblin nor good wizard working in secret for Braque. No. The only genius at work was his creative ability. By simple evolution of thought Braque could consider the picture complete as it was.
The explanation of the phenomenon is simple. All the Salons, from the time of the Impressionists and beyond, have seen it at work. First, the mind boggles to consider the unknown, the odd, the stranger as familiar. His instinct of preservation will implement a rejection process, causing a scandal for example.
But gradually, if the object has not been destroyed, or if others, similar, managed to emerge, the opposite effect occurs, either by taming, or by assimilation. Again, time was the architect of success.

This long introduction is here to help me tell what happened to me when making the Invitation No. 11. The entire composition tends to bring the look toward the face.This latter should be interesting enough to deserve the viewer's attention effort. But how to do it ? The gaze is down, one third of the face is hidden. Only the hair remain. How to make it interesting and expressive on such a small area?
We saw on the first reproductions of paintings that I piles up layers, seeking movement, volume, brightness, and this to the point where the surface is clearly overloaded. It remains then the alternative to bleach the surface with an extra layer or eventually try to gradually wash the colors making a painting by withdrawal. I implemented this last option to get this [painting]
La version définitive
The effect as it is would be acceptable if an almost continuous dash wasn't surrounding the area, transforming my painting into a drawing. One had to search further.
A few days later, I spread roughly with a spatula some very diluted juice of my three primary colors, with traces of white here and there. At first, the result seemed unacceptable. I was very disappointed. Soon after, it appeared that I had painted a sub-layer very interesting to develop. I was happy of that perspective. At the time I write this, I have come to think that this hair was finally as I wanted it to be, without knowing it really!
You may, or not, approve my choice. Come back to see it in a while, and maybe you'll tame it.
To see the entire painting (Invitation No. 11 tempera on Arches 76x56cm)

dimanche 29 novembre 2015

Simple et libre

La seule vraie difficulté en peinture est d’être simplement libre et librement simple.
Miroir  tempera sur papier 32x20cm
Ce n’est pas un jeu de mots.
 Je veux juste dire que parmi le fouillis indescriptible de tous les conditionnements que j’ai acquis au long de mon existence, trouver un chemin de liberté est une vraie difficulté. Ma liberté est difficile à définir.
 D’autre part, faire vœu de simplicité est une bien belle direction à prendre pour cheminer. Mais si, d’aventure, je ressens un besoin de faire de la dentelle, pourquoi devrais-je m’en priver ?
 L’expression artistique demeure pour moi une tentative d’expression, de communication et d’esthétique. Cela implique de pouvoir évoluer dans un contexte libre, peut-être simple, en tous les cas et surtout serein.
 C’est ainsi que pour pouvoir faire le point sur mes outils d’expression, l’autoportrait demeure pour moi le véritable exercice d’authenticité :
  • modèle toujours disponible
  • modèle indifférent à toute considération narcissique
  • peintre libre de prendre son temps et de jouer avec son tableau.

kiss  [Keep It Simple & Short]

​Pour nos amis anglophones, une libre et simple et excellente traduction de Christina.
For our English speaking friends, a free, easy and excellent translation from Christina.
Au commencement ...

English résumé

The only real difficulty in painting is to just be simply free and freely simple.
This is no wordplay.
 I just want to say that among the indescribable jumble of all the conditioning that I have acquired throughout my existence, finding a free path is a real problem. My freedom is difficult to define.
 On the other hand, making vow of simplicity is a beautiful way of wandering. But if, by chance, I feel a need to privilege subtlety, why should I do without it?
 Artistic exteriorisation remains for me an attempt of expression, communication and aesthetics demonstration. This implies to evolve in a free context, perhaps simple, in any cases and above all serene.
 Thus, in order to be able to update my means of expression, self-portrait remains for me the true exercise of authenticity:
  • The model (me) is always available
  • This particular model (me) remains free from any narcissistic consideration
  • The artist (me) is welcome to take his time and play with his own production.
kiss [Keep It Simple & Short]

samedi 14 novembre 2015

Peindre ou faire la guerre

Prologue – Peindre ou faire la guerre

« miroir 02 »
tempera à l'oeuf sur papier
egg tempera on paper
31x20.5cm
J’allais publier mon article lorsque j’apprends, qu’à nouveau, des états armés se font la guerre par victime civiles interposées. Les marchands d’armes et autres profiteurs de conflits commencent à y croire, leurs beaux jours se dessinent de plus en plus précisément à l’horizon.
Je suis pris d’une insidieuse contagion celle de la violence. La tentation de la violence. C’est ma nature -humaine-.
Heureusement, mon système immunitaire mental réagit à merveille et, peu à peu, je retrouve mon esprit constructif -humain lui aussi- qui me permettra d’agir à ma façon. Ceci même si mon attitude paraît dérisoire en comparaison de ce que vivent les victimes de toute horreur.
(suite de cette réflexion en fin d’article)

Voici donc.

Peindre-dessiner : l'état d’esprit en actes

    peindre – dessiner
    montrer – dire
    teindre – délimiter
    tacher – ligner
    poser un accord – tracer une mélodie
Les attitudes suivantes sont nécessaires aux deux spécialités :
Contempler – analyser – reproduire sa « petite » (Cézanne) sensation.
Peindre serait une attitude plutôt démonstrative, alors que dessiner serait une attitude plus discursive, plus intellectuelle. Tout ceci me semble très réducteur.
Chercher à peindre–dessiner revient pour moi à vouloir utiliser l’ensemble des potentiels du cerveau au service d’une expression artistique visuelle graphique. Simplement.
projet -esquisse
L’outil n’est pas le pinceau ni le crayon, mais bien l’intention, la lumière, la couleur et l’acte de les poser sur la surface picturale. C’est donc bel et bien la touche, les intentions qui la motivent et l’énergie qui l’anime qui font l’œuvre d’art. La touche qui se fait incisive ou caressante, précise et fine, ou large voix fondue, discursive ou passive, allusive ou rêveuse…
(En ce sens, l’art japonais du sumi-e est une forme de dessin–peinture)
On a souvent dit que le dessin permet d’entrer dans l’intimité du peintre. Admettons, mais alors que dire de la peinture de Bonnard, qui d’ailleurs reposait fermement sur ses nombreux dessins préparatoires. Que dire aussi des bozzetti et modelli de Rubens (ses diverses esquisses à l’huile) ?
De plus, l’artiste ne suffit pas à la production artistique. Je veux dire qu’il n’y a pas que le « faiseur » (poète, en grec). De l’autre côté de l’œuvre se trouve le récepteur. Spectateur (quelquefois propriétaire) outillé de sa sensibilité, de son regard, de son état d’esprit forgé par tout ce qui a fait qu’il est présent devant une image qui va réellement influencer son existence, positivement ou non. Sa vision lui appartient en propre. Sa part artistique est aussi importante que celle du poète visuel.
ébauche couleur
D’aucun diraient que ce sont les critiques, les mécènes et le marché qui font l’art, mais ce n’est vrai que depuis Masaccio et la Renaissance. Ils ne font d’ailleurs pas l’art, mais la renommée et l’oubli des “artistes”… qui se portaient probablement mieux lorsqu’ils étaient artisans, itinérants ou établis.

Epilogue – Rendre son esprit disponible à la beauté plutôt qu’à l’horreur.

Notre culture de masse – cinéma, télévision, etc. – nous abreuve de situations où une logique concurrentielle, agressive, violente est la norme. Les personnages se débattent dans un monde et une société d’humains au mieux indifférents, au pire hostiles.
De ce fait, le cerveau des spectateurs devient de plus en plus capable d’accueillir une telle réalité et, sans même la provoquer, peut la considérer le cas échéant comme « normale ». En effet, il se passe au niveau du fonctionnement cérébral la même chose qu’avec les phénomènes publicitaires. Nous n’avons pas besoin d’un produit, encore moins d’une marque. Mais le jour où la question se posera, on se dirigera automatiquement vers les produits et les marques déjà vues ou entendues, car elle sont tout bonnement familières à nos circuits neuronaux et leur évitent ainsi une analyse coûteuse en énergie.

fin ébauche couleur
Je suis un humain, faiseur d’images. Mon cerveau d’humain a besoin d’explications, de causes, d’effets. Comprendre. Je n’ai aucune théorie pour permettre à mon cerveau… perfectible, de comprendre vraiment tout cela. Je crois qu’un principe vital universel est à l’œuvre, au sens large. Mon expérience me montre que je ne vais bien qu’en état d’harmonie, qui elle-même se nourrit de ce que l’on nomme au sens large l’amour, la bonté ou parfois, la beauté. Voilà pourquoi je veux continuer à tout prix à proposer des images dont le contenu – au minimum esthétique – prédispose à les accueillir : la voie de la beauté.

Ce faisant, je ne suis pas un grand innovateur. Lors des deux dernières guerres mondiales (je veux dire la 1 et la 2) Bonnard n’agissait pas autrement, par exemple. Avant cela, Rubens a choisi de magnifier l’humain en général, ses épouses successives et ses enfants en particulier, ce qui lui permettait de croire mieux que de survivre, dans un siècle où les horreurs et la peste n’épargnaient ni sa contrée, ni sa famille. Il œuvrait aussi en tant que diplomate – son statut le lui imposait – mais il ne s’engageait qu’en faveur de la paix. Les exemples de peintres résolument positifs, parfois activistes, ont été nombreux dans l’histoire de l’art. C’est tant mieux.
corps de peinture

J’en ai assez dit. Je ne sais pas ce qu’il en est pour vous, mais pour ma part, je suis convaincu.
Allez… Salut les artistes !

Et bonjour les artistes anglophones. Traduction par Christina :

English Résumé


Prologue – To paint or make war

I was going to publish my article when I heard that, again, armed states make war by interposed civilian victims. Arm dealers and other war profiteers act as if they believe that their heydays emerge more and more precisely on the horizon.
I briefly suffered from an insidious contagion… that of violence. The temptation of violence. This is my nature – human –.
Fortunately, my immune system reacted well and, step by step, I found again my – human too – constructive mind that will allow me to act my way. This, even if my attitude seems pales in comparison to the experiences of victims of any horror. (This discussion will continue at the end of this article).

So here's.
reprise des clartés

Paint – draw: the state of mind in action

    paint – draw
    show – say
    dye – delineate
    stain – Line
    ask an agreement – draw a melody
The following attitudes are necessary to both specialties :
Contemplate - analyze - reproduce the "small" (Cézanne) sensation.
To paint is an attitude rather demonstrative, while to draw is an attitude more discursive, more intellectual. All this seems very reducer.
Seeking to paint or draw means to me using all the potential of the brain in the service of a graphic visual artistic expression. Simply.
The tool is not the paintbrush or the pencil, but the motive, the light, the color and the act of placing them on the pictorial surface. It is indeed the touch, the underlying intentions and the driven energy which form the work of art. The touch that is caressing or incisive, precise and fine, or ample melted voice, discursive or passive, allusive or dreamy…
seconde reprise couleur
(In this sense, the Japanese art of sumi-e is a form of drawing and painting)
It was often said that the drawing allows you to enter into the intimacy of the painter. I recognize that, but then what about the paintings by Bonnard, who are also firmly based on his numerous preparatory drawings. And then, what is to say about the bozzetti and modelli of Rubens (his various oil sketches)?
Most of all, the artist does not suffice to the artistic production. I mean there is not only the "doer" (poet, in Greek). On the other side of the artpiece is the receiver. Onlooker (sometimes owner) equipped with his sensitivity, his vision, his state of spirit wrought by everything that has brought him before an image that will really influence his existence, positively or not. His vision belongs to him. His artistic hand is as important as that of the visual poet.
Some would say that it is the critics, sponsor and the art market that « make » art, but this is true only since Masaccio and the Renaissance. In fact, they dont « do » the art but only the fame or the oblivion of “artists”… which were probably better of when they were only artisans, itinerant or established.
travail achevé
«
 miroir 02 »
tempera à l'oeuf sur papier
egg tempera on paper
31x20.5cm

Epilogue – To make one’s mind available to beauty rather than horror.

Our mass culture – movies, TV, etc. – inundates us with situations where a logic of competition, aggressiveness and violence is the norm. The characters struggle into a world and a human society at best indifferent, at worst hostile.
Therefore, the brain of the spectator becomes more and more able to accept such norms and, even without inducing them, may consider them as "normal". Indeed, it happens at the level of brain function the same things as with the advertising phenomenon. We do not need a product, m
uch less a brand. But when the question will arise, it will automatically direct us towards the products and brands already seen or heard of, as they are simply familiar to our neuronal circuits and prevent them from an expensive loss of analysis energy.

vérification des valeurs
verification of values
I am a human, images maker. My human brain needs explanations, causes, effects. Understanding. I have no theory to allow my brain… perfectible, to really understand it all. I believe that a universal vital principle is at work, at large. My experience shows me that I feel well only in a state of harmony, which feeds itself with what is called, in the broad sense, love, kindness or sometimes beauty. That's why I want to continue, at any cost, to provide images whose content – at least aesthetically – predisposes to welcome : the way of beauty.

In doing so, I am not a great innovator. During the two world wars (I mean the 1 and 2) Bonnard did not act otherwise, for example. Before that, Rubens has chosen to magnify the human in general, his wives and children in particular, which allowed him to think better than to survive in an age when the horrors and plague spared neither his country nor his family. He also was working as a diplomat – his status obliged him to – but he only pledged in favor of peace.
Examples of painters resolutely positive, sometimes activists, have been multiple in the history of art. So much the better.

I've said enough. I don’t know how it is for you, but as far as I am concerned, I am convinced.
Come on… hello artists !

mardi 13 octobre 2015

double-portrait

Deux portraits.

montage de deux portraits

La même personne. 
Eclairage naturel, cheveux libres ; éclairage électrique, cheveux noués.
Chevelure vivante ; masse sombre.
Traitement affiné ; touches chaotiques.
Le résultat final doit être vivant, que l'on regarde les visages représentés, les visages montrés, l'image présente (la peinture).







Si la structure est dynamique, on peut se permettre un traitement mesuré ; si la peinture est vibrante, la sensation de vie devient agitation.




















Si la structure est stable, on peut se permettre des touches plus libres - même chaotiques, sous peine de figer la vision, d'éteindre l'étincelle vivante.












Les couleurs de la triade dite primaire (jaune - rouge - bleu) encore dynamisée par le jeu des complémentaires (bleus - ocres orangés) procure la sensation immédiate de vivacité. Comme une tonalité majeure en musique.

La luminosité générale du tableau de jour est très sombre (des valeurs  de 40 à 90%) permettent des rehauts lumineux presque à 100% (bordure de la chevelure est quelques saillies du visage). Ce choix permet d'évoquer l'expérience du modèle, tempérant une vivacité forte, évoquée par la structure générale dynamique.










La luminosité générale du tableau du soir est paradoxalement assez claire (de 10 à 60%) tempérée par le contre-jour utilisé pour traîter le modèle. Un choix qui permet d'évoquer une maturité somme toute chaleureuse, parfois contrastée.

Les couleurs de la triade secondaire (orange - vert - violet), sans contraste complémentaire, procure la sensation d'apaisement ; la dominate chaude et ses teintes éclaircies permet d'assurer l'impression de quiétude. Si la préférence avait été donnée au violet, on aurait vu une mélancolie apparaître. C'est la tonalité dite mineure en musique.




Ces deux portraits évoquent la même personne, en utilisant des options suffisamment diverses pour permettre d'offrir un dyptique respectueux du modèle.
Elle mérite d'autant mieux ce respect et cette considération qu'elle m'offrit un total de trois heures et demie de pose (210 longues minutes) réparties en sept sessions de vingt à quarante minutes. C'est énorme et difficile à supporter pour un modèle qui n'est pas professionnel !
C'est peu pour garantir une ressemblance «photographique» mais cela permet une très bonne approche de la représentation de l'état d'esprit de la personne, tel qu'il est confié au peintre.

Diptyque d'un jour et d'un soir
NB :  Ces deux peintures sont des tempera à l'oeuf, sur papier de 41x31cm chacune.

And now, the english version by Christina..

Two portraits.

 (First picture : Mounting of two portraits)
Same person.
Natural lighting, free hair; electric lighting, knotted hair.
Living hair; dark mass.
Refined treatment; chaotic keys.
The final result must be lively, that we look at the represented faces, the faces shown, the present image (painting).

If the structure is dynamic, we can afford a measured treatment; if the paint is vibrant, the sensation of life becomes one of restlessness.
If the structure is stable, we can afford more free keys - even chaotic, under penalty of freezing the vision, turning off the lively’ spark.

The colors of the so-called primary triad (yellow - red - blue) still driven by the interplay of complementary ones (blue - orange ocher) provides an immediate feeling of liveliness. As a major key in music.

The overall brightness of the day picture is very dark. Values from 40 up to 90% allow bright highlights up to almost 100% (the edge of the hair and some facial projections). This choice permit to evoke the experience of the model, tempering a strong vitality, referred to by the general dynamic structure.

The overall brightness of the evening picture is paradoxically pretty clear. About 10-60%, tempered by the light used to treat the model. A choice that evokes a mature altogether warm, sometimes mixed, personnality.

The colors of the secondary triad (orange - green - violet) without additional contrast provides the soothing feeling; dominated by the warm and sunny colors, ensures a quiet printing. If the preference was given to purple, we would have seen some melancholy appear. This is the so-called minor tonality in music.

These two portraits evoke the same person, however using a large enough variety of options allowing a diptych respectful of the model.

She deserves all the more respect and consideration that she offered me a total of three and a half hour of pose (210 minutes long) in seven sessions fromtwenty to forty minutes. This was huge and difficult to bear for an amateur model !

It's still short to ensure a "photographic" likeness but it does allow a very good approach of the state of mind of the person, as entrusted to the painter.

(Last picture : Diptych day and night)

NB : These two paintings are egg tempera on paper 41x31cm each.

mardi 22 septembre 2015

Chaos II

Rappel


Lors du précédent article, nous avons réabordé le sujet du Chaos et de sa représentation. Le résultat de la première étude montrait la juxtaposition de deux zones clairement distinctes (structure du tableau = composition structurelle), de par leur coloration (chaude et froide) et leur structure interne liée à leur texture respectives, l'une très définie par des verticales et des horizontales, l'autre par un traitement plus organique, directement inspirée par les formes générales d'un arbre.
Le motif qui inspirait cette image était d'ailleurs un massif de bouleaux devant un grand immeuble locatif.

Et maintenant

Pour l'étude d'aujourd'hui, le but est d'arriver à représenter une structure purement chaotique. Le résultat propose une image assez organique. La grosse difficulté pour représenter un tel sujet est justement l'absence d'une structure, de repères reconnaissables. Pourtant, ici également je me suis inspiré d'un motif réel, naturel. Afin de le rendre peu identifiable, j'ai utilisé d'autres couleurs que celles du sujet.
Je présente le résultat final d'abord. Les études préalables viennent ensuite. De cette façon, chacun aura le loisir d'essayer de deviner ce que peut bien être la source première du tableau.
NB : cette peinture a tempera sur papier (30x40cm) sera marouflée ultérieurement sur un support rigide. Des taches de feuilles d'or y seront alors ajoutées afin de le parachever. Les emplacements des dorures sont déterminées par les éclats d'une sous-couche altérée, dont les traces en creux demeurent apparentes à travers les couches supérieures. C'est donc bien un déterminisme chaotique qui propose les endroits dorés, ce qui ajoute encore au vrai thème de cette peinture : le chaos.

Invitation 03, étape finale (avant dorure)

Invitation 03, étape 3

Invitation 03, étape 2

Invitation 03, étape 1

English Résumé

Recall

In the previous article we re­addressed the subject of Chaos and its representation. The result of the first study showing the juxtaposition of two zones clearly distinct (= structural composition of the table structure), by their color (hot and cold) and internal structure related to their respective texture, one of them very defined by verticals and horizontals and the other by a more organic treatment, directly inspired by the general shape of a tree. The reason that inspired this image was also a clump of birches in front of a large apartment building.

And now

For today’ study, the goal is to represent a purely chaotic structure. The result offers a fairly organic image. The big difficulty to represent such a subject is precisely the absence of structure and recognizable landmarks. Yet here again I was inspired by a real, natural topic. To make it less identifiable, I used other colors than those of the subject.
I am presenting the final results at first. Preliminary studies will come afterwards. This way, everyone will have the opportunity to guess what may well be the first source of the picture.
NB : this painting in tempera on paper (30x40cm) will later be laid on a rigid support. Gold leaf spots will then be added to finalization. The gilding locations are determined by the shrapnel from an altered undercoat whose hollow traces remain exposed through the upper layers. It is therefore a chaotic determinism which offers golden locations, which adds to the real theme of this painting : chaos.

mercredi 18 mars 2015

Etudes avec gouache

Je me suis proposé de compléter mes moyens d'études préliminaires.  Ils se limitaient jusqu'ici au fusain, aux crayons de graphite, aux crayons de couleur et à l'aquarelle.
L'usage de la gouache, pensais-je, devait me permettre d'approfondir les essais de sous-couches, dont je fais grand usage dans ma pratique picturale.


Matériel et recette de la gouache

- Pinceaux absorbant, mais assez nerveux (soies de porc ou synthétiques), plats ou/et ronds, grandeur 2 à 8, c'est-à-dire qu'on ne recherche pas le détail, mais uniquement la lisibilité.
- Papier relativement résistant, minimum 120 g/m2, de format a5,soit  148 × 210mm,(maximum a4) ; inutile de prendre plus petit (illisible) ni plus grand (c'est pour une étude, pas une fresque sur la Muraille de Chine !)
- Une palette plate, ou creuse si vous préférez.
- De la gouache dont voici la recette :
  +1 volume de pigments (poudre) + (facultatif)1-2 vol. de craie (CaCO3)
  +1 volume de dextrine
  +1-3 volume(s) d'eau déminéralisée selon consistance désirée
  +1 goutte d'eau de miel (1:2) par ml du mélange ci-dessus
  +quelques gouttes d'essence de girofle, pour la conservation.

J'ai fait cinq petites pochades rapides qui m'ont démontré les principales qualités de la gouache, mais aussi ses limites. Les quatre premiers travaux se bornent aux valeurs lumineuses ; ainsi deux couleurs suffisent : blanc et terre d'ombre brûlée. Difficile de faire plus simple.
Dans le premier, j'utilise les transparences de l'aquarelle et les opacités liées surtout aux nuances de blanc.
Mêler ces deux techniques représente une vraie gymnastique mentale, tant les deux concepts sont différents. En effet, l'aquarelle permet d'incarner les couleurs dans la lumière originelle (le blanc du papier). D'une manière alternative, le blanc opaque de la gouache offre la possibilité de revêtir les couleurs de lumière matérialisée en empâtement (les soleils de Turner étaient épais comme des pièces de monnaie !). 
gouache N°1 (Conrad Veidt - Cabinet Of Dr. Caligari -1920)
Dans ce premier exemple (issu du film Le cabinet du docteur Calligari, tout comme le second), le visage seul est illuminé par la gouache.
(Les deux traits rouges sont des rehauts de crayon, ajoutés juste "pour l'art" ;o).

Les trois études suivantes sont peintes avec la gouache opaque uniquement. Pour les deux derniers, j'ai d'abord peint une couche unie de terre d'ombre légèrement diluée, ce qui permet de poser très rapidement les principales ombres et lumières, tout en laissant les demi-tons apparaitre. Le but, ne l'oublions pas, est d'utiliser ce medium pour faire des études préliminaires rapides, non de passer des heures pour parfaire une oeuvre !
gouache N°2 (1920 - Cabinet Of Dr. Caligari)


gouache N°3 (1968 - Night of the LD - Romero)


gouache N°4 - Musidora (1915 - Les Vampires - Feuillade)
gouache N°5 Toulouse-Lautrec - 1901?
Apres avoir peint ces quatre études de valeur, je me suis senti assez à l'aise avec la gouache pour introduire les trois couleurs primaires dans ma palette. J'y ai également ajouté un ocre doré (de Vérone), petit caprice esthétique :o)
J'ai crayonné les axes du visage par dessus un fond d'ocre peu dilué. J'ai ensuite posé les chauds, les froids, les ombres et quelques lumières. Après quelques minutes de séchage, j'ai travaillé tous les tons avec de la couleur épaissie de gouache blanche. J'ai ensuite redéfini, voire reprécisé, les tonalités et les valeurs, souvent sous forme de rehauts.
(J'ai pris comme modèle l'un des maîtres des «techniques de la gouache» : Toulouse-Lautrec, ici à la triste fin de sa vie.)


Conclusion et bilan provisoire

La gouache est un outil d'étude extraordinaire. Facilement et rapidement mise en oeuvre, elle permet d'obtenir un apperçu convenable d'une image en phase de création. En 10 à 45 minutes on obtient une reflet convaincant de son imagination. C'est parfait !
Il est cependant illusoire de tenter une approche des sous-couches qui feront vibrer le futur tableau : les sous-couches de gouache sont diluées par les couches suivantes ! Il faudrait intercaler des résines solubles en essence de térébenthine pour protéger la gouache soluble à l'eau uniquement. L'étude perd alors sa légèreté et sa simplicité, gages de rapidité, voire de fraîcheur.
Mais cette méthode (résine intercalaire) serait parfaite pour des oeuvres entièrement peintes à la gouache.


English Résumé

I made some studies with my own home-made medium. The purpose is to have a very simple and versatile medium to make preliminary studies.
Both coloured and tonal works are quickly made and sufficient. The gouache will be a fine tool in my future projects. 

lundi 24 février 2014

Chaos mais pas trop

Anglophones, you're welcome ; if the google traduction (select your language in the right column) doesn't do it well, please find a little english résumé at the bottom of this article  :o)

Objectif

Après l'expérience des structure chaotiques,il m'est apparu nécessaire d’appliquer le procédé mis en évidence sur le projet de portrait appelé provisoirement Nefertitine. Pour bien me rendre compte des avantages et inconvénients des lignes et structures chaotiques, je fais sur le même dessin une partie de la chevelure avec le procédé académique classique (report des mesures de proportions et d'angles). Pour simplifier l'étude, je reprends les carreaux initiaux.

Matériel

Une feuille pour croquis 120g de 20x20cm, un stylo à bille d'encre noire, quelques crayons de couleurs pour la mise en évidence de certaines masses.

Bilan

1- La partie droite du dessin, réalisée avec la méthode académique m'a demandé environ 105 minutes de travail.
La tendance était d'insister un peu trop vite sur les détails. Pour simplifier le travail, j'aurais du éventuellement poser des ombres, mais le problème est que le projet inclut une forte luminosité et peu de contrastes. L'étude aux traits est donc nécessaire.
2- La partie gauche a été réalisée avec des lignes chaotiques, tout en regardant très souvent le modèle.
Le rythme des ondulations est donné par les lignes chaotiques et les indications d'ombres légères sont des hachures.

Il n'a fallu que 25 minutes pour réaliser cette surface qui représente les 2/3 du dessin ! Si j'avais réalisé ainsi toute la chevelure, il ne m'aurait fallu que 45 minutes, y compris la mise en couleurs ; avec la méthode académique, il m'aurait fallut 315 minutes (plus de 5 heures !) sans les couleurs...

La seconde image a été réalisée par traitement informatique du dessin ci-dessus.  Son but est de supprimer autant que faire se peut les traits noirs pour ne conserver que la mise en évidence colorée des masses.

Reste à prouver que cette méthode peut s'appliquer facilement au pinceau. L'usage d'une pointe ferme, crayon, plume, stylo à bille, rend l'exercice très facile. La pointe souple du pinceau ne risque-t-elle pas d'augmenter un peu trop l'aspect chaotique ?

Que sera sera.

English Résumé


 This study is made using two techniques.
The right part is made the academical way with mesures and report of proportions and angles. The left part, which is bigger in surface, has been made with chaotic lines and structures, as explained in my previous topic (please, see here).
The second method is far more faster than the first and not very less precise, I think.
The question remains if I'll manage to do the same with a soft brush as well as with a ball pen and colour pencils.
Please, notice that the top image is the real study ; the bottom one has been computerized in order to put the colour surfaces and lines in evidence.

mardi 18 février 2014

TEMPERA sur MDF

__  Objectifs

    Est-il possible de peindre avec des tempera maigres et grasses sur un panneau de mdf, sans s'imposer l'application du gesso ou le marouflage d'un papier ou d'une toile ?
    Il s'agit de simplifier encore le processus artistique, sans péjorer sa qualité ni sa pérennité.
    Les règles à respecter pour cela concernent la porosité de la surface à recouvrir, qui diminue en fonction de l'augmentation de la phase huileuse.
Nous devons tenir compte d'une très grande porosité du mdf brut, qui agit comme une véritable éponge en présence d'eau. Or une émulsion contient une part d'eau non négligeable. Il faut donc diminuer la capacité d'absorption du mdf, sous peine de voir le pigment demeurer en surface, privé de son liant et donc prêt à retourner à la poussière.




__  Protocole

    Je propose donc de mettre deux couches de gélatine jouant le rôle de bouche-pores. Ceci se fait sur les deux faces et les quatre tranches.
première couche
première couche
Ensuite, après un ponçage assez fin (grain 320) on applique sur les tranches et le verso une tempera moyennement liquide de terre d'ombre naturelle (couleur très siccative et relativement neutre, bien qu'assez sombre ; rien n'empêche d'utiliser du blanc de titane-zinc ou tout autre pigment solide et séchant assez rapidement).
Selon l'efficacité des deux couches préalables de gel, deux couches de tempera sont suffisantes à assurer une bonne imperméabilité des faces non picturales. En cas de doute ou de pulsion perfectionniste on peut sans autre passer une troisième couche qui fera de cet envers une merveille de sombre chaleur. Georges de la Tour ne l'aurait pas renié.

On peut à ce stade considéré que le panneau est encapsulé et prêt pour les finitions de la préparation du recto, soit de la face qui sera le support de l'image.
seconde couche
seconde couche
Voici comment : 
- après un ponçage fin (grain 400 ou plus), on applique une nouvelle couche de gélatine, augmentée de 5 à 10 % de jaune d'oeuf. Ce dernier rendra le feuil de gel moins friable et plus accueillant pour les ébauches et autres sous-couches.

NB : On peut, si les deux premières couches de gel vous semblent suffisantes, passer directement à l'ébauche ; c'est alors cette dernière que l'on couvrira du mélange gel-jaune ou, plus simplement, d'une couche de médium de base dilué avec trois volumes d'eau distillée (elle ressemble à un papier marouflé et préparé au médium de base (voir l'article "Préparation du papier pour tempera grasse").

 Note : A ce stade, aucune mention de fond lumineux (en remplacement d'un gesso blanc) n'a été faite.

Le mdf est de couleur terre de sienne (grosso modo) et permet une ébauche facile puisque fonctionnant immédiatement comme demi-ton ; restent à poser les lumières et les ombres.
Il est possible de donner le fond lumineux ensuite, lors de la pose de la couche de médium de base protectrice, en lui ajoutant du blanc 'titazinc' par exemple. Une première passe serait juste suffisant pour éclaircir sans anéantir l'ébauche, les lumières fortes pouvant être affermies par des vellature ultérieures.

    Ceci dit, rien n'empêche d'ajouter un pigment blanc à la préparation de gel enrichi d'oeuf que nous posons avant l'ébauche.

Quoi qu'il en soit, ce sont les différentes couches de tempera au jaune d'oeuf qui parachèveront l'encapsulation du panneau de mdf et le protégeront des tentations d'absorber l'éventuelle humidité ambiante.  En contrepartie, la couche picturale ne pourra être endommagée par des gonflements ou des moisissures provenant de l'intérieur du panneau.

__  Conclusion

Cette méthode, bien que ressemblant à une traditionnelle préparation au gesso est néanmoins beaucoup plus économique en peine et en temps.
En effet, nul besoin de préparer des enduits nécessitant une certaine température et donc la mise en oeuvre d'un bain-marie.
Nul besoin d'être hyper-fin lors de la pose de la tempera : deux voire trois couches et votre surface est parfaitement régulière. Au demeurant, ce n'est pas la surface picturale qui est enduite. Le ponçage progressif du gesso jusqu'à une granulométrie de 600 voire 1000 n'est plus qu'un souvenir.  Si par nostalgie on désire poncer la surface du mdf aussi finement, on peut le faire sans problème et sans laisser de trace : le mdf est parfaitement docile.
Pour terminer la liste des avantages, retenons le fait que si le panneau se voile très légèrement lors de l'application des deux premières couches de gel, il se redresse parfaitement lors du séchage.  Les couches de tempera provoque le même phénomène, mais d'une manière encore plus ténue, la tempera séchant beaucoup plus vite que le gel et ne pouvant,grâce à ce dernier, qu'à peine pénétrer encore la surface.
C'est ainsi que pour quatre panneaux totalisant un demi mètre carré il ne m'a fallu qu'un total de deux heures de travail, y compris la préparation du gel et de la tempera, du lavage du matériel et du rangement de l'atelier.
Vous ajoutez à cela les temps de séchage, soit un quart d'heure entre les deux couches de gel et une nuit avant de passer la première couche de tempera. La deuxième couche peut se passer quasi immédiatement  :o)

Franchement, je ne passerai plus mon temps à poser du gesso, sauf  crise irrépressible de nostalgie. Quant au marouflage du papier d'aquarelle, je le garderai pour des panneaux qui ne présenterait pas une surface favorable, ou pour prolonger un dessin en peinture si l'envie m'en prenait.
le résultat
Le résultat

Pour la petite histoire

Cette idée de peindre sur panneau brut me trottait dans la tête depuis des mois.   J'ai sauté le pas après avoir lu le Compendium de Jacques Blockx offert par un ami de Belgique -qu'hommage lui soit ici rendu une fois encore- et dans lequel le mettre préparateur explique qu'on peut et même devrait peindre sur bois brut pour une excellente conservation ; la précaution à prendre serait de bien nettoyer le panneau à l'essence de térébenthine (pour éviter que de l'eau ne voile le panneau de bois) et «de les enduire ensuite d'une mince couche d'huile pour favoriser l'adhérence et pour empêcher les couleurs de s'emboire outre mesure». Il ajoute qu'on peut remplacer l'huile par l'application au tampon de gomme-laque (lire les pages 23 et 49 de l'édition de 1921).
Ce qui m’amena à penser qu'on pourrait enrichir la tempera de terre d'ombre avec du vernis dammar. Mais ne sachant pas comment cette résine dammar réagit en présence des composants résineux du mdf, j'ai préféré m'abstenir de cette adjonction pour le moment.  Il faudrait faire des essais à long terme ou trouver le renseignement ailleurs que là où j'ai déjà longuement cherché  :o)



vendredi 14 février 2014

PROCESSUS ORCHIDÉE - Nouvelle Approche

__ Session 1 __


_ Objectifs


ébauche au crayon
ébauche au crayon
Essayer de mettre en place un processus de base qui me soit favorable tant sur le plan de l'efficacité que de la durabilité de l'image et du plaisir que j'ai à l'élaborer.

_ Déroulement

    Mise en place de la composition au crayon de couleur Polychromos de Faber-Castell, c'est-à-dire des couleurs à base huileuse !  Cela me permet de faire une recherche colorée très légère en terme de valeur.  L'avantage est double :
    - j'économise du temps et de la palette putride    ;
    - je conserve un fond relativement lumineux pour travailler mes couches tempera en transparence ;

    - comme les traces de crayon sont grasses, elles acceptent sans problème une sur-couche de médium de base (j + ô) pour protéger les fibres de cellulose de l'huile liquide pénétrante -le crayon n'est que couvrant et donc inoffensif ; il sera possible ensuite de revenir par grattage jusqu'à cette couche de protection, d'autant que je vais la doubler d'un médium maigre à la résine dammar (j + d + ô).

Viennent ensuite les reprises a tempera. Je n'utilise pour l'heure que les trois couleurs primaires, posées en hachures et en glacis successifs, déterminant progressivement les zones chaudes, froides, en prévision des zones lumineuses et sombres.
J'ai fait tout ceci durant les trois premières sessions.

_ Bilan

première reprise a tempera
première reprise a tempera
    Ce fut un vrai plaisir de "dessiner"
Je me rends bien compte qu'en plus du plaisir de peindre, j'ai réellement besoin de dessiner, c'est-à-dire de mettre en concept par l'image.  C'est quelque chose entre l'écriture et la peinture, entre la parole et la fabrication, la matérialisation de l'image.
    La pose du médium à l'oeuf implique un certain jaunissement de l'image.   Cela n'a pas d'importance pour les endroits qui seront recouverts de nouveaux pigments, mais cela implique que je perds le blanc originel du support.
Peut-être devrais-je ajouter une certaine quantité de pigment blanc à ce médium de protection , l'inconvénient serait de perdre une partie de la coloration initialement dessinée, mais je conserverai un plus grand potentiel de luminosité.
    Il faudra voir dans quelle mesure le jaunissement du médium de protection s'éclaircira au fur et à mesure de son séchage complet, de sa siccativation en profondeur.  Peut-être suffit-il d'attendre quelques jours pour avoir une protection totalement translucide et incolore.

__ Session 2 __


_ Objectifs

    Une fois les sous-couches posées avec les primaires transparentes seules, je cherche à retravailler les luminosités en utilisant des vellature ; ces dernières sont constituées de blanc seul, parfois, mais le plus souvent de blancs teintés de diverses terres.

_ Déroulement



seconde reprise a tempera
seconde reprise a tempera

Pour les blancs c'est selon :
    - l'oxyde de zinc, très translucide et peu siccatif, permet de trouver des nuances aux teintes composées ; il permet également de voiler des couleurs déjà posées et qui demanderaient un peu plus de luminosité -vellatura-, mais de manière très progressive. Contrairement au titane, il ne prend pas tout de suite l'apparence crayeuse
    - l'oxyde de titane, très couvrant et siccatif, permet un retour rapide à une grande luminosité de fond ; c'est la lessive qui permet de calmer les excès des sous-couches ; cela autorise aussi les changements d'orientation de la composition
    - le 'tizinc' -appellation non contrôlée- est un mélange de 2/3 titane et 1/3 zinc. Il permet de blanchir ou éclaircir rapidement mais avec une certaine marge de manoeuvre. On dit qu'il est celui qui se rapproche le plus de la céruse, mais il est toutefois moins siccatif, en partie à cause du zinc.

Les teintes de terres permettent un voilage ou un lavage des zones colorées en fonction de la température de couleur que l'on désire :
    - pour une vellature chaude, l'ocre jaune ou doré ou de Chypre, voire un jaune hansa primaire
    - pour des chairs, le rouge de Venise ou l'hématite, en nuances plutôt refroidies par le blanc de titane, voire un violet quinacridone primaire
    - pour une vellature froide, la tob -terre d'ombre brûlée- voire un bleu phtalocyanine primaire.
Premières vellature
Premières vellature
Bien sûr, les couleurs primaires ne sont pas considérées comme des terres et sont transparentes, s'alliant donc bien au blanc de zinc lui aussi translucide ; les terres, opaques, peuvent s’accommoder très bien du blanc de titane ou du tizinc plus souple et moins crayeux.

Quoi qu'il en soit, j'ai posé ces voiles en suivant le processus suivant :
    - premières passes en hachures, parfois croisées, pour 'entrer' très progressivement dans la couleur avec des pinceaus à jupon
    - lorsque les zones sont bien délimitées et la tonalité presque atteinte, j'utilise des mouilleurs en petit-gris pour poser des voiles plus larges et presque secs qui harmoniseront les surfaces, atténuant légèrement la présence des traits
    - je reviens ensuite aux couleurs avec un médium mi-gras cette fois-ci, utilisant alternativement les deux méthodes et types de pinceaux, jusqu'à ce que toutes les couleurs et toutes les valeurs soient définitivement atteintes.

La peinture est posée
La peinture est posée

_ Bilan

    Si lors de la première session j'ai eu le plaisir de dessiner, dans la seconde ce fut celui de peindre que je me suis accordé, bien que les hachures soient plutôt des graphismes ; les mélanges sur la palette ou en transparence sur le tableau, le choix des pigments, le dosage des médiums et de l'eau (onctuoisité et transparence), les variations de taille, de qualité et de touches des pinceaux, bref tout cela était du ressort de la pure peinture, tout en laissant par endroit transparaître la couche première qui était dessinée.
    Je dois cependant noter que j'ai omis de poser une couche de médium pur avec résine dammar après la pose des blancs ; il vaudrait mieux que j'y pense à l'avenir, car cette couche me permet d'isoler les blancs des couleurs et de pouvoir gratter ces dernières pour retrouver les blancs(*).
    Pour ma part, je considère cela comme du pure plaisir d'imagier, me fiant tantôt au modèle mais aussi à ce que le tableau me suggère par ses caractéristiques propres.
    Reste les finitions qui, selon toute vraisemblance, allieront à nouveau les deux attitudes picturales.

(*)    Ces couches intermédiaires et insolubles sont indispensables avant et après chaque couche ; il faut bien les laisser sécher avant toute nouvelle intervention. Elles sont presque équivalente au vernis à retoucher ; en fait, lorsqu'elle est posée en fin de session elle est comme un vernis d'encollage, et en début de session elle est comme un vernis à retoucher ; il faut cependant prendre garde en début de session à ne pas la poser en une passe large et généreuse, ce qui rendrait la couche inférieure trop facilement dommageable, à cause de l'excès momentané d'humidité.  Ces couches d'une passe sont à réserver pour une fin de session, suivies d'un temps de séchage d'une nuit. En début de session, on peut très bien les poser comme des glacis, au fur et à mesure de l'avancée du travail.  Elles sèchent vite tout en restant collante juste le minimum nécessaire à la bonne adhésion de la couche suivante. Elle joue bien là le rôle de vernis à retoucher.

__ Session 3 __


_ Objectifs

    Terminer l'image en lui donnant les caractéristiques visuelles harmonieuses et expressives qui ont motivés son élaboration
ébauche au crayon - détail
ébauche au crayon - détail

_ Déroulement

    Après une pause visuelle, je me réfère au modèle pour vérifier qu'aucune bonne part ne soit omise sur le tableau, puis je l'oublie, ne me référant qu'à ce que me montre la surface picturale. C'est ainsi que je vais pouvoir lui donner son équilibre et sa propre harmonie par les vellature et les glacis, mais aussi par des touches de couleurs pures déposées finement çà et là au gré des nécessités en terme de rehauts colorés, lumineux et sombres, chauds et froids ; je m'assure que la troisième dimension, voire la quatrième, soit bien mise en place, tout en évitant de les surjouer, de les caricaturer.

_ Bilan

détail peinture achevée
détail peinture achevée
    Ce travail est de la patiente orfèvrerie ; si je devais sentir une impatience ou un agacement, il vaudrait mieux attendre un meilleur moment, car c'est maintenant que tout se joue et se détermine.

    De fait, la patience et la clarté visuelle sont de la partie aujourd'hui et ce sont à nouveau quatre heures de pure plaisir pictural.   Le résultat plaira à autrui ou non, cela m'importe peu en ce moment car de mon pont de vue je me retrouve complètement dans cette image et peut l'assumer pour ici et maintenant  :o)
le processus est fini
le processus est fini
rappel photo
rappel photo